Lot de 9 saucissons 120 gr
Lot de 9 saucissons. Viande Française. Les saucissons font 120 gr plus ou moins.
Lot de saucissons composé comme suit:
Saucisson nature, Saucisson enrobé au poivre, Saucisson enrobé aux herbes, Saucisson aux noisettes, Saucisson aux cèpes, Saucisson ail des ours, Saucisson au Beaufort, Saucisson au fromage de chèvre, Chorizo fort
Cet article vient en complément de celui que j’avais réalisé lors de la création du blog (la fleur blanche du saucisson) et s’adresse plus particulièrement aux bienheureux qui fabriquent leur propre charcuterie maison.
Après plusieurs années d’apprentissage et d’expérimentation, il est évident qu’un des aspects les plus mystérieux et les plus « angoissants » dans la fabrication des salaisons est ce développement de moisissures qui peut pointer son nez assez rapidement après le début du séchage.
Qu’est-ce donc ? Quel est leur rôle ? Que doit-on faire ? Est-ce normal ? Est-ce dangereux ?
Ce sont des interrogations légitimes lorsqu’on débute la fabrication de charcuterie et la phase délicate du séchage. Il m’a d’ailleurs fallu beaucoup de temps, de réflexion (le soir au coin du feu) et de recherche pour avoir une vision, je l’espère, objective.
Autant dans les livres de charcuterie, vous pouvez trouver somme de détails sur les étapes de fabrication du saucisson, autant lorsqu’il s’agit d’appréhender la fleur du saucisson, d’un coup, ces sources deviennent peu disertes. Que nous disent néanmoins les principales sur le sujet ?

- Dans « la Charcuterie en France » de René Pallu, il est confirmé l’importance du développement de ces moisissures (blanches ou vertes) dans l’élaboration de la saveur du produit ainsi que leur rôle dans la prévention du croûtage en permettant un séchage plus lent. Il est évoqué qu’en séchage naturel, le développement des moisissures est la plupart du temps erratique.

- Dans « Pratique et Technique en Charcuterie Salaison » de Laszlo Hennel, il est dit que la fleur a un impact clair sur l' »onctuosité » et la maturation du produit. Par contre il insiste bien sur les défauts que représenteraient une fleur autre que blanche, qui sans doute aucun, apporterait mauvais goût et mauvais séchage aux saucissons. Il indique que lorsque des « tâches noires » et des moisissures vertes apparaissent, il s’agit d’un excès d’humidité et lorsque les moisissures sont jaunes, c’est que le séchoir est malpropre.
Ce qui est marrant dans ce qu’on pourrait désigner comme les deux premiers livres réellement techniques sur le sujet, c’est qu’ils ne soient pas d’accord entre eux. Le premier évoque le penicillium Glaucum comme une moisissure essentielle et le second comme une moisissure « verdâtre », de roquefort, préjudiciable à la sèche. Et il insiste sur le fait que finalement toutes les moisissures autres que blanche sont souvent dommageables au séchage en « bouchant les pores » des boyaux. Le problème avec le deuxième livre, c’est qu’à chaque éventuel problème, un produit est proposé à l’achat pour y remédier…

- Continuons avec « La Charcuterie Crue » de M. Migaud, le plus complet sur le sujet, qui parle du séchage naturel par les anciens comme étant beaucoup plus propice au développement d’une « belle » fleur naturelle que ne l’est le séchage actuel dans les grosses unités de production dues aux fortes variations d’hygrométrie causées par l’arrivée perpétuelle des saucissons fraîchement étuvés. Il précise que lorsqu’il y a une absence de fleur sur le saucisson, celui-ci aura tendance a être plus acide. Il est précisé également qu’en séchage traditionnel, la probabilité est très forte de se retrouver avec des moisissures vertes (consécutives aux blanches) et que celles-ci ne partiront vraisemblablement pas même en jouant sur l’hygrométrie du séchoir. Je note que la fleur du saucisson peut créer par déshydratation superficielle un petit anneau rouge en périphérie qu’il ne faut pas confondre avec celui, plus large, caractéristique du croûtage. Et point important, l’examen de la fleur de surface naturelle a révélé une très forte diversité de levures et moisissures, dont certaines sont toxinogènes. Heureusement, l’absence de toxicité inhérente dans le saucisson est également rapporté. Le poissage des saucissons y est abordé mais nous y reviendrons plus tard.

- Dans « l’encyclopédie de la charcuterie », un petit passage sur les moisissures sauvages nous évoquent leurs inconvénients, à savoir la difficulté à maîtriser leur développement, leur aspect souvent multicolore et peu engageant, leur action sur le goût trop marquée certaines fois et je cite « la production éventuelle de mycotoxines ».
- Dans le livre « le saucisson sec » de Dabin Jussiaux, qui est sûrement la bible du saucisson industriel, la fleur sauvage est décrite comme ayant des couleurs « allant du blanc au noir, en passant par le vert selon les moisissures ou les levures qui s’implanteront ». On apprend là aussi que des mycotoxines peuvent être produites mais il n’y a pas plus de précisions à ce sujet.

- Pour finir dans le livre « Technologie des produits de charcuterie et des salaisons » de Paule Durand, qui est sûrement le plus pointu sur la charcuterie, la fleur naturelle ainsi que sa production éventuelle de mycotoxines apparaissent à la marge. Il est plutôt dit que les fleurs de surface à appliquer pendant la fabrication sont la solution à l’uniformisation des produits, difficile autrement.
Sinon, aucun autre livre n’en parle réellement. Aucun mot dans le livre du compagnon-charcutier par exemple, qui a pourtant une partie sur le saucisson sec assez détaillée. Et vraiment aucun mot non plus dans la foultitude de livres pour amateurs. Ce n’est pourtant pas un non sujet, vu le nombre de questions portant sur le développement de cette satanée fleur lors du séchage. Et c’est d’ailleurs la raison qui me pousse à en faire un article: essayer d’y voir plus clair.
Le point principal que je déduis de tous ces éléments, c’est que la fleur naturelle n’est pas du tout souhaitée pour le professionnel, d’autant plus quand ce professionnel est un industriel. Imaginez un peu, une production qui varie entre chaque, quel horreur ! Non, il faut que le produit soit uniforme, que rien ne distingue ce saucisson d’un autre et surtout qu’il soit tout blanc, uniquement blanc quitte à utiliser des poudres de fleurage après lavage. En effet même lorsque des fleurs de surface, servant à sélectionner les bonnes moisissures, ont été ajoutées, cela peut ne pas suffire (ou que le saucisson sèche tellement vite et fort que la fleur n’a même pas la possibilité d’apparaître).
Mais nous, consommateurs, sommes aussi coupables. La plupart d’entre nous, préfèrent apparemment un beau blanc immaculé qu’un gris vert poussiéreux. D’ailleurs, j’ai lu sur l’emballage d’un saucisson, un message de l’équipe marketing prévenant que la fleur « spéciale » de ce saucisson était verte car elle était naturelle: une belle prise de risque ! Je peux donc comprendre que laisser se développer une fleur non vendeuse à la surface de ces saucissons est une chose qui ne doit pas se prendre à la légère.
En dehors de l’aspect induit par la fleur externe, il y a également la composante gustative. Effectivement les levures et les moisissures vont avoir une activité protéolytique et lipolytique responsable en partie du développement de l’arôme du saucisson. Un saucisson sans fleur est moins bon, un saucisson avec trop de fleur n’est pas bon non plus mais surtout un saucisson avec une fleur naturelle peut avoir des goûts qui différent d’une production à l’autre et d’un séchoir à l’autre avec pourtant exactement les mêmes ingrédients. C’est pourquoi là aussi, la fleur sauvage n’est pas souhaitée pour le professionnel dans le souci d’uniformité du produit.
Cette fleur naturelle est trop difficile à maîtriser dans les cadences infernales des usines à saucissons, c’est pourquoi la fleur de surface, pulvérisée par exemple après embossage, a été la solution miracle. Bien entendu, certains professionnels réussissent à sortir de véritables saucissons du terroir, à maîtriser tout le processus pour obtenir une belle fleur, mais ce savoir faire ne doit vraisemblablement pas rimer avec rentabilité.
Finalement, dans la fleur sauvage, celle que l’on aura forcément dans notre petit séchoir d’amateur, un seul mot fait peur: mycotoxine ! Il suffit de taper sur google ce mot-clef et de lire certaines publications pour s’alarmer. Croyez moi, vous ne mangeriez pas un saucisson sec si l’on vous disait qu’il avait été ensemencé à la moisissure mycotoxinogène, et moi non plus d’ailleurs. Mais serait-il pour autant réellement dangereux pour la santé ? J’essaye actuellement d’obtenir la réponse auprès de l’auteur d‘une récente étude dont c’était justement l’objet. Il est dit que de la mycotoxine de ces saucissons très spéciaux a bien été retrouvée sur la peau de façon significativement plus élevée par rapport aux autres saucissons mais la dose était-elle réellement dangereuse ? Je ne sais pas. Par contre, l’auteur précise que ces conditions sont irrationnelles dans la réalité puisque ce qui compose la fleur naturelle de nos saucissons est extrêmement diversifié. L’auteur ne parle pas non plus du taux de mycotoxine retrouvé à l’intérieur du saucisson mais conclu néanmoins que le risque d’intoxication aiguë à la mycotoxine sur un saucisson sec est faible (mais qu’appelle-t-on un risque faible ?).
J’ai trouvé d’autres sources:
- Dans le livre « la charcuterie crue »de M. Migaud, il évoque l’étude de Moreau (moisissures et mycotoxines dans les viandes et produits de charcuterie). On y a pas accès via le net mais il la cite comme une étude très rassurante à ce sujet et qu’elle « confirme l’observation courante d’absence d’accidents après consommation ».
- On peut trouver cette étude sur « la production de patuline dans les saucissons secs » qui évoque une détoxification possible à l’intérieur du saucisson.
- Par contre, les mêmes auteurs font une autre étude sur les conditions de production d’ochratoxine A (OTA) dans les saucissons secs qui est moins rassurante car ils observent une stabilité de la mycotoxine dans la chair à saucisson. Mais là aussi, ils partent sur des saucissons ensemencés à la moisissure spécialement productrice d’ochratoxine donc des conditions non réalistes. Je vous cite un passage intéressant: « Dans les salaisons de viandes sèches (jambons, saucissons), il faut une humidité relative supérieure à 80%, une température élevée (de 20 à 30°C) et une forte teneur en eau du substrat pour obtenir des quantités notables de mycotoxines dans les produits (ALPERDEN et al.; BURMEISTER et LEISTNER) et, même dans ces conditions, CIEGLER et al.. ne retrouvent pas d’ochratoxine, de citrinine, de patuline, de trémortine malgré un développement abondant des moisissures productrices à la surface des salamis, ce qui les amène à supposer l’existence de « phénomènes de détoxification » ».
- Un rapport de 2009 a été fait sur « L’évaluation des risques liés à la présence de mycotoxines dans les chaînes alimentaires humaine et animale » et un passage sur les salaisons (P51) nous intéresse fortement: « La consommation de produits carnés contaminés par les ochratoxines a été identifiée comme une source possible d’exposition humaine à l’OTA (JECFA, 2001). La mise en évidence de souches fongiques capables de produits de l’OTA sur les produits de salaisonnerie (ESCHER et al.; 1973, Tabuc et al.; 2004), ainsi que la caractérisation directe de la toxine sur ce type d’aliments (Jimenez et al.; 200 ; Chiavaro et al, 2002) posent le problème de leur contamination directe. Après contamination par des souches toxinogènes, la production directe d’OTA sur les produits de salaisonnerie semble toutefois très faible, en dépit d’une grande stabilité de la toxine (ESCHER et al.; 1973 ; Bailly et al, 2005). » Il y a même un endroit où j’ai cru comprendre qu’ils remettaient même en question l’ensemencement artificiel des salaisons car il pouvait finalement y avoir plus de risques de mycotoxinogénèse qu’avec la fleur sauvage dans le sens où l’on pouvait sélectionner une fleur en pensant à tort qu’elle était atoxique. En gros, il vaut mieux avoir plein de moisissures différentes sur le saucisson même si certaines sont productrices de toxines que de se gourer et d’ensemencer avec une seule si on s’aperçoit ensuite qu’elle était toxique (P9: De nouvelles utilisations de micromycètes sont freinées par la crainte de présence de mycotoxines. Autrefois sélectionnés sur la base de l’absence de toxicité observable, elles sont aujourd’hui passées au crible pour détecter des gènes de toxinogenèse).
- Pour mettre « fin » au débat qui s’agite dans ma tête, je suis allé directement demander l’avis à un expert, ingénieur agronome, spécialisé entre autres dans les produits carnés et ce dernier m’a clairement répondu que les doses de mycotoxines retrouvées dans les saucissons (ensemencés ou non) étaient globalement insignifiantes…
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